Des repères rassurants : comment des signes simples rendent la maison plus sûre pour les seniors

18/08/2025

L’environnement domestique : un lieu familier devenu terrain d’incertitude

Le domicile reste le lieu privilégié des seniors en France : près de 93% des personnes de plus de 75 ans vivent chez elles (source : INSEE, 2022). Si la maison évoque le confort et la liberté, elle peut devenir source d’insécurité lorsque l’âge avance, notamment en cas de perte de repères, de baisse de vision ou de troubles cognitifs. Chaque année, 2 millions de chutes sont recensées chez les personnes de 65 ans et plus, et l’environnement domestique concentre 81 % de ces accidents (source : Assurance Maladie, 2021).

Si l’on pense d’abord à l’aménagement des espaces ou aux aides techniques, un levier simple et souvent négligé fait toute la différence : la signalétique. Bien choisie, bien placée, elle influe directement sur la sécurité, le sentiment d’autonomie et la capacité à rester actif et serein chez soi.

Pourquoi la signalétique est-elle si précieuse pour les seniors ?

  • Faciliter l’orientation : Perte de mémoire ou simple confusion ponctuelle, l’orientation dans les pièces ou entre les étages peut devenir un défi. Un pictogramme sur une porte, un code couleur dans les couloirs, apportent des repères visuels efficaces.
  • Réduire le risque d’accident : Un marquage au sol prévient la chute sur une marche, un autocollant “sol glissant” évite le faux-pas dans la salle de bain : de petits gestes qui sauvent parfois de graves blessures.
  • Diminuer l’anxiété : Devoir chercher sa chambre, hésiter sur une porte, c’est souvent source de stress quand la mémoire flanche. La présence de signes explicites apaise, favorise l’autonomie, et renforce la confiance au quotidien.

Les types de signalétique et leur utilité concrète dans la maison

1. Les pictogrammes et étiquettes

  • Sur les portes : Placer un pictogramme “toilettes”, “chambre”, “salle de bain” au niveau du regard réduit nettement les confusions, en particulier en cas de troubles légers de la mémoire. La Fédération Française des Ergothérapeutes recommande d’utiliser des symboles simples, en contraste franc, pour tous les seniors, même en l’absence de maladie cognitive diagnostiquée.
  • Sur les tiroirs ou armoires : De petites étiquettes (par exemple, “couverts”, “médicaments”) évitent la recherche interminable et le risque d’erreur (erreur de médicament, par exemple) qui augmente avec l’âge.

2. La signalétique au sol

  • Bandes contrastées sur les marches : Un marquage adhésif jaune ou blanc signale le début et la fin d’une marche. L’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) souligne que ce contraste, en particulier pour les marches en bois ou en moquette, réduit de 30 % le risque de chute chez les plus de 75 ans.
  • Repérage des zones à risques : Les autocollants antidérapants colorés dans la douche, baignoire ou devant l'évier préviennent les glissades inattendues.

3. Codes couleurs et éclairages

  • Utiliser des couleurs vives pour différencier les espaces : Des murs colorés, une plinthe contrastante indiquant la porte d’entrée, codent l’espace. La Fondation Alzheimer rapporte que la différenciation par la couleur diminue l’agitation et les erreurs de porte chez les seniors désorientés.
  • Luminaires led ou veilleuses signalétiques : Installer une veilleuse à proximité du sol guide le chemin la nuit, sécurise le parcours entre la chambre et les sanitaires — un moment chaud pour les chutes nocturnes.

4. Signalétique sonore et interactive

  • Carillons ou détecteurs à message sonore : Ces outils sont précieux pour soutenir les seniors à déficit visuel (“attention marche”, “porte non verrouillée”). Certains systèmes connectés, de plus en plus accessibles, annoncent une action (“vous entrez dans la cuisine”). La Fondation VISIO souligne leur impact positif auprès des personnes âgées en perte sensorielle.

À quel profil de seniors la signalétique profite-t-elle le plus ?

On pense spontanément aux personnes déjà très désorientées, mais l’intérêt de la signalétique s’étend bien au-delà :

  • Les seniors ayant des troubles mnésiques légers, pour retrouver salles d’eau et objets essentiels sans solliciter leur entourage.
  • Les personnes malvoyantes, grâce aux contrastes forts et aux signaux tactiles (stickers en relief, bandes podotactiles).
  • Toute personne souffrant d’une maladie neurodégénérative débutante (Alzheimer, Parkinson) bénéficie énormément d’un environnement organisé visuellement.
  • Mais aussi toute personne âgée en situation temporaire d’inconfort (retour d’hospitalisation, fatigue, sensation de désorientation la nuit).

Des études réalisées par l’Université de Stirling (Écosse), pionnière sur l’environnement adapté au vieillissement, montrent qu’introduire une signalétique simple chez les seniors autonomes retarde le besoin d’aides humaines extérieures, prolongeant de 2 à 3 ans en moyenne la possibilité de rester chez soi (source : Dementia Services Development Centre, 2017).

Quelques conseils pratiques pour installer une signalétique adaptée

  1. Observer le quotidien : Repérer les lieux confus, les zones où les objets sont oubliés, où les allers-retours sont fréquents. Interroger le senior sur ses besoins, sans présomption d’“oubli” ou de “faiblesse”.
  2. Privilégier la lisibilité : Gros caractères, pictos simples, couleurs vives sur fond uni. Une étude de l’INSA de Lyon indique que le contraste (noir sur blanc ou jaune sur noir) multiplie par 6 la vitesse de reconnaissance du signal chez les plus de 70 ans.
  3. Soigner le positionnement : Les signaux doivent être placés à hauteur des yeux dans les lieux fréquentés, et sur les passages incontournables (portes de salle de bain, marche d’escalier, tiroirs à médicaments, etc.).
  4. Impliquer l’aîné dans le choix : Personnaliser la signalétique : choisir ensemble les formes, les mots ou les couleurs favorise l’acceptation, et diminue la sensation d’infantilisation.

Il existe aujourd’hui des kits-cadres pré-fabriqués, mais aussi de nombreuses possibilités de création maison, avec des étiquettes plastifiées, du ruban adhésif de couleur ou des stickers à acheter ou à fabriquer. L’important ? Que ça parle et que ce soit clair.

N’oubliez pas : la signalétique se revisite. Les besoins évoluent ! Refaire un point chaque année ou après un événement de santé permet d’ajuster efficacement.

Signalétique : idées reçues et précautions à connaître

  • La signalétique n’est efficace que si elle reste simple et cohérente. Ajouter trop de signes ou multiplier les codes complique la compréhension. Mieux vaut une information claire, visible, dans les lieux stratégiques.
  • Attention à la surcharge visuelle. Un excès de signalétique, surtout en couleurs ou formats variés, peut nuire à l’objectif initial. La Sobriété est le maître mot.
  • Eviter les supports miroitants ou brillants. Ils créent parfois des reflets gênants pour ceux qui souffrent de cataracte ou d’un début de DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge).
  • Pensez au renouvellement régulier des marquages au sol. Bandes déchirées ou stickers effacés deviennent des pièges.

Signalétique et bien-être psychologique : des bénéfices insoupçonnés

L’impact de la signalétique va au-delà de la simple sécurité. Savoir où l’on se trouve, retrouver rapidement un objet, c’est reprendre confiance dans sa capacité à agir par soi-même. C’est aussi préserver la dignité et diminuer la dépendance envers les proches ou les aidants.

Plusieurs enquêtes menées par la CNSA (Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie) montrent que 68 % des personnes âgées accompagnées par une signalétique adaptée déclarent se sentir moins anxieuses dans leur quotidien, et 52 % disent faire davantage d’activités seules à la maison (source : CNSA, 2022).

La signalétique s’impose ainsi, avec l’éclairage, l’organisation du logement et l’accès à l’extérieur, comme l’un des piliers pour une autonomie préservée, en douceur et en sécurité. Un outil modeste, souvent bon marché, mais à l’efficacité surprenante quand il est bien pensé.

Pour aller plus loin : explorer, adapter, évoluer

Chaque maison, chaque histoire, chaque aîné est différent. La multiplicité des solutions signalétiques offre un panel d’idées à assortir selon les besoins et les envies. Ce qui fonctionne dans une famille devra être réinventé dans une autre.

Professionnels de l’accompagnement, proches, seniors eux-mêmes : chacun peut prendre l’initiative. De nombreux guides pratiques sont proposés par la CNSA, France Alzheimer, ou encore l’ANACT (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail), pour vous aider à évaluer et transformer, pas à pas, votre environnement domestique afin qu’il soutienne l’autonomie aussi longtemps que possible.

La signalétique n’est pas un gadget, c’est un outil précieux pour la sécurité, l’estime de soi, mais surtout pour la liberté choisie de rester chez soi, entouré de repères rassurants et adaptés à chacun.

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